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Opinion Tribune des Echos du 26 février 2025 : "Nos soignants ont besoin de plus d'horizontalité"

L'amélioration des conditions de travail dans les métiers du soin passe par un management de proximité axé sur le parcours du patient, plaident Philippe Lorino, professeur à l'Essec, et Etienne Minvielle, contributeur à la revue Polytechnique Insights.
Quand on les interroge sur les difficultés de leur métier au quotidien, médecins, infirmiers, directeurs d'hôpitaux et patients évoquent plus des sujets pratiques que des questions de gouvernance ou de structure. Ce sont le remplissage des « fichiers Excel », les violences subies quotidiennement ou les bugs informatiques qui sont pointés du doigt, et désormais dénoncés par un grand nombre de professionnels. Ces thèmes suggèrent qu'une partie des problèmes se situe dans l'activité de prise en charge du malade.
Il faut avoir conscience que cette activité s'est largement transformée ces dernières années, devenant plus rapide, plus réactive face à l'incertitude et plus soucieuse de coordination le long du parcours de chaque patient, mais donc aussi plus complexe à organiser.
Des solutions existent, mais restent invisibles
En regard de ces problèmes, beaucoup des réponses apportées négligent l'expérience vécue par les professionnels et les patients. Par exemple, le « fardeau administratif » représente une source de mécontentement pour de nombreux soignants qui jugent être ainsi détournés de leur activité clinique. Pour résoudre cet irritant du quotidien, les réformes proposent de numériser les données. Mais cet idéal du « zéro-papier » oublie les conditions nécessaires à l'implantation des logiciels et autres applications d'assistance. Faute d'accompagnement soigneusement préparé, l'idéal suscite en réalité des dysfonctionnements et des bugs informatiques qui ne font qu'amplifier les sentiments négatifs.
Pourtant, des solutions existent, conçues par les professionnels impliqués. Par exemple, les hiérarchies hospitalières sont jugées trop verticales, conduisant à des injonctions descendantes au détriment des demandes formulées par la base opérationnelle, comme d'être réactif lorsqu'un problème informatique intervient dans un service. En réponse, des démarches innovantes se développent dans différents lieux, fondées sur des délégations et des prises de décisions plus partagées. De même, face au problème du lien ville-hôpital, des dynamiques enclenchées par divers professionnels permettent d'améliorer la coordination. Malheureusement, ces solutions locales restent le plus souvent invisibles aux yeux des instances supérieures.
Pourtant, des solutions existent, conçues par les professionnels impliqués. Par exemple, les hiérarchies hospitalières sont jugées trop verticales, conduisant à des injonctions descendantes au détriment des demandes formulées par la base opérationnelle, comme d'être réactif lorsqu'un problème informatique intervient dans un service. En réponse, des démarches innovantes se développent dans différents lieux, fondées sur des délégations et des prises de décisions plus partagées. De même, face au problème du lien ville-hôpital, des dynamiques enclenchées par divers professionnels permettent d'améliorer la coordination. Malheureusement, ces solutions locales restent le plus souvent invisibles aux yeux des instances supérieures.
Ces constats en suggèrent un autre, plus général : l'activité réelle et ses problèmes ne sont pas en France un objet de réflexion prioritaire pour les couches dirigeantes. Les problèmes de l'activité sont souvent considérés comme des détails. Pour modifier la perspective, il semble utile de s'inspirer d'autres approches comme celle du pragmatisme américain de Peirce, Dewey et Follett. Ainsi, de nouvelles pistes apparaissent : le transfert d'un « pouvoir sur » vers un « pouvoir avec » dans le cas des hiérarchies, ou le développement des apprentissages nécessaires à l'amélioration de la coordination interprofessionnelle.
« Les problèmes de l'activité sont souvent considérés comme des détails. »
Si l'enjeu est mal perçu, il est pourtant de taille. La non-qualité provient pour une grande partie (environ 70 %) de défauts d'organisation. 10 % des dépenses de santé sont liées à des défauts de mise en oeuvre comme des doublons ou des venues à l'hôpital injustifiées. Plus encore, l'attractivité des métiers du soin dépend autant de la qualité de vie au travail que de la rémunération. Or cette qualité de vie est liée aux modes d'organisation mis en place : hiérarchies, climat au sein des équipes, circulation de l'information. Alors qu'il a souvent mauvaise presse, c'est bien le management qu'il faut développer, mais un management de proximité centré sur le parcours du patient et tourné vers les acteurs de terrain. Plutôt qu'une énième réforme de structure, l'hôpital a besoin de cette orientation tournée vers les acteurs de terrain.
Philippe Lorino est professeur à l'Essec Business School.
Etienne Minvielle est professeur à l'Ecole polytechnique (IP Paris) et contributeur à la revue Polytechnique Insights
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