Les malentendus de l'information. Pour une approche pragmatique de la gestion de l'information en entreprise.

Thèse de doctorat ès sciences de gestion soutenue le  2 octobre 1996.

Résumé :

L'étude combinée des discours et des pratiques autour des problèmes d'information en entreprise montre comment la rationalité érigée en dogme arrive à produire des situations inextricables, A cet égard, l'exemple de l'informatique est révélateur. Dans le but de maîtriser toutes les informations utilisables partout et par tous, la technologie peut accaparer les moyens de l'action et augmenter le cloisonnement de l'organisation. Le système devient alors si complexe que l'information risque de perdre tout lien avec l'action.

Ces situations sont parfois démêlées grâce à l'intervention d'acteurs dont l'intelligence est tournée vers la pratique: ils stimulent une coopération basée sur la confiance entre le pouvoir de décision et les tâches d'intendance quotidienne. Ils permettent la réappropriation de la technique au service de l'action.

Les tenants d'une organisation rationnelle se trouvent confrontés aux protagonistes de la négociation. Pour les premiers, les procédures et les systèmes informatiques ont valeur normative. Les incessants bricolages et détournements restent invisibles ou sont condamnés s'il devient impossible de les camoufler. Pour les seconds, les bricolages sont assimilés à l'ajustement mutuel indispensable au bon déroulement de l'action. Ces pratiques alors légitimes influencent également l'évolution des systèmes.

La description des modalités pratiques dans lesquelles se combinent des savoirfaire non réductibles à des règles figées, ne doit pas cacher les coûteux efforts d'attention mutuelle consentis pour parvenir à l'action collective. Combiner astucieusement les préoccupations stratégiques avec les contraintes des travaux manuels de l'intendance ne se fait pas sans douleur. Accepter la relativité des points de vue rend plus performante la gestion de l'information mais oblige à prendre conscience que cette réalisation reste éphémère, locale et souvent conflictuelle.

Cette vision chaotique où l'organisation évolue par petites approximations successives oblige à revoir les habituels repères rationnels qui eux supposent un monde stable et objectivable. Est-ce un nouveau modèle auquel paradoxalement les technologies participent ou s'agit-il simplement d'un passage obligé vers un nouvel ordre ?

Mots clés : Gestion de l'information, vigilance ordinaire, rationalité, acteur médiateur, action située, agencement organisationnel, cognition distribuée, intelligence collective.

Composition du jury :