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Des nanobatônnets pour mesurer l’écoulement de fluides

Grâce à une collaboration entre deux laboratoires de Polytechnique, le Laboratoire de la Physique de la Matière Condensée et celui d’Hydrodynamique, une équipe de chercheur a mis au point une nouvelle méthode de mesure des caractéristiques d’écoulement d’un fluide. Leurs travaux font l’objet d’une publication dans la revue Nature Nanotechnology.

L’écoulement d’un fluide dans un réseau capillaire plus ou moins complexe, comme par exemple dans un vaisseau sanguin, fait l’objet de nombreuses études qui intéressent notamment le domaine de la santé. Or, les recherches expérimentales actuelles se heurtent à la difficulté de caractériser ces écoulements à toute petite échelle, de quelques centaines de nanomètres. Et pourtant, l’avancée des recherches en hydrodynamique permet aujourd’hui des simulations toujours plus performantes. Pour aller plus loin et répondre à ce défi, une équipe de chercheurs de l’X a eu l’idée d’allier les compétences de son laboratoire, celui de la Physique de la Matière Condensée (LPMC), à celles du Laboratoire d’Hydrodynamique (LadHyX), ainsi qu'avec l'aide de scientifiques de l'Université d'Amsterdam.

Dans un premier temps, l’équipe a synthétisé des nanocristaux de phosphate de lanthane ayant la forme de nanobatônnets, d’un diamètre de 10 nm et d’une longueur de 200 nm. « Ces petits bâtonnets ont la particularité de pouvoir s’aligner sous l’effet des forces de cisaillement qui accompagnent l’écoulement du fluide dans lequel ils sont dispersés », indique tout d’abord Thierry Gacoin, chercheur au Laboratoire de la Physique de la Matière Condensée. Ensuite, l’équipe a inséré des ions Europium luminescents dans ces nanocristaux, permettant alors de donner à ces bâtonnets des propriétés d’émission de lumière fortement polarisée, c’est-à-dire que la forme du spectre d’émission observé varie selon l’orientation du bâtonnet. « Grâce à ces propriétés, une mesure simple de la lumière émise par ces bâtonnets permet de retrouver assez directement leur orientation spatiale », observe le chercheur. Au total, ces deux effets - l’alignement des bâtonnets dans un écoulement et la possibilité de déterminer leur orientation par observation au microscope – permettent d’utiliser ces bâtonnets pour analyser, en temps réel et avec une résolution inégalée, l’écoulement d’un fluide dans un canal microfluidique de petite taille.

Ce travail ouvre des perspectives prometteuses pour la compréhension fondamentale de phénomènes liés aux écoulements d’un fluide dans des canaux complexes. Au-delà, ces sondes d’orientation pourraient également être utilisées en biologie, pour suivre in-situ des mécanismes complexes liés à la dynamique d’orientation de bio-macromolécules afin d’en expliquer les propriétés et leurs modes d’action. D’autres utilisations sont envisageables, en médecine notamment : cette nouvelle méthode pourrait permettre d’étudier la circulation dans les vaisseaux sanguins pour comprendre les échanges avec les parois ou l’accumulation de matières responsables de maladies telles que l’athérosclérose par exemple.

> Lire la publication de Nature Nanotechnology