Henri Poincaré entrait à l’X il y a 150 ans, le 2 novembre 1873. Cette grande figure de la science déborde tout projet d’exposition tant par l’ampleur de son œuvre que par la multiplicité de ses implications sur les scènes scientifiques, le monde technique, le champ philosophique ou la sphère publique. Mais elle permet aussi de porter un regard original sur une École polytechnique alors en pleine évolution : si Poincaré a souvent été célébré comme un savant universel, c’est sous l’angle particulier de sa relation avec son école que l’envisage cette exposition.

L’élève Poincaré nous invite tout d’abord à franchir le seuil de l’École polytechnique de 1873. Pour le suivre dans ce lieu clos et codifié, il est conseillé de se munir d’un lexique de l’argot qui s’y est développé à la faveur du casernement des élèves. Sa correspondance avec sa mère et sa sœur dresse le portrait intime d’une scolarité et esquisse de nombreuses silhouettes auxquelles les archives et collections de l’École permettent de redonner vie et épaisseur. Elle porte aussi un regard à hauteur d’homme sur une période charnière dans l’histoire de Polytechnique. L’épidémie de choléra de 1865, la guerre de 1870 puis la Commune de Paris ont provoqué des ruptures dans les traditions des élèves. Les rituels qui réapparaissent en 1873 donnent une forme nouvelle à l’enjeu essentiel de l’incorporation dans une même communauté. Mais l’heure n’est pas à la reprise des rites les plus festifs tels que les ombres ou le point Gamma. L’École est encore hantée par le désastre de la défaite face à la Prusse. La réorganisation de l’armée lui impose une réforme profonde tandis que le développement de l’enseignement supérieur lui donne de nouveaux concurrents.

©École polytechnique/J. Barande

A l’appui de manuscrits inédits récemment acquis par la Société des amis de la bibliothèque et du musée de l’X, la seconde partie de cette exposition s’attache aux nombreux liens que Poincaré entretient avec son école durant sa carrière. Les rôles joués par de nombreux camarades, enseignants puis collègues montrent l’importance des relations sociales nouées à l’École polytechnique. Les retours de Poincaré à l’X comme répétiteur, membre du Conseil de perfectionnement puis professeur sont l’occasion de suivre les évolutions de la figure du savant tout comme celles de l’École polytechnique dans la France de la IIIe République dont la science est devenue une clef de voute.

Cette exposition est tributaire de nombreuses recherches sur Poincaré et son œuvre, notamment celles menées aux Archives Henri Poincaré de Nancy, et tout particulièrement l’ample travail de l’historien Laurent Rollet.

©École polytechnique/J. Barande